Comment danser au rythme de la vie ?

Savez-vous danser sur le rythme de la vie ? Dans la vie, il m’arrive si souvent d’être en mode marche puis arrêt. Il m’arrive parfois d’être à l’écart de la vie, et il m’arrive parfois d’avoir la grâce de couler dans son flot. Mais comment danser sur le rythme de la vie ?

La vie est mouvement

La vie est vie. La vie est mouvement. La vie est jaillissement. La vie est éclosion. La vie est énergie. La vie est musique. La vie est émotion. Danser sur le rythme de la vie, c’est oser sortir de l’ombre, et accompagner avec force et agilité le mouvement que nous propose la vie. Ce peut être essayer quelque chose de nouveau dont nous avons envie depuis si longtemps. Ce peut être s’engager de tout notre cœur dans une rencontre inattendue. Ce peut être emprunter un chemin inconnu qui nous fait si peur. Ce peut être prendre cet élan et sauter dans une eau bleue profonde. Ce peut être cesser de regarder cette vieille blessure et tourner nos yeux vers cette immensité lumineuse qui nous appelle. Ce peut être courir vers celui que nous aimons, sans peur ni appréhension, juste avec la certitude d’aimer et d’être aimé. Pour Henri Bergson :

« La vie est ce qui échappe à la saisie. »

Danser avec la vie, c’est renoncer à ce qui nous immobilise, renoncer à ce qui tue notre créativité, renoncer aux empoisonnantes rassurantes habitudes, renoncer à penser qui nous sommes comme une identité figée. 

La joie se convoque au moment présent

S’il existe un signe que nous sommes bien embarqués dans la valse mélodieuse de la vie, c’est la joie. La joie que nous éprouvons à nous sentir unis à quelque chose de plus grand qui nous dépasse. La joie qui dépasse la peur. La joie qui dépasse la honte. La joie qui dépasse la colère. La joie est ce sentiment qui surgit de nulle part et qui vient nous cueillir dans un moment où tout à la fois nous donnons et nous recevons harmonieusement. La joie est cette explosion intérieure qui nous embarque et embarque ceux et celles qui nous entourent.

La joie ne se vit pas hier, ni demain, elle se vit au moment présent. C’est ce que nous apprend la méditation de pleine conscience. Pour Eckart Tollé :

« Plus nous sommes axés sur le temps, c’est-à-dire le passé et le futur, plus nous ratons le présent, la chose la plus précieuse qui soit. »

Henri Bergson, lui, va plus loin. Pour lui, il ne s’agit pas tant uniquement d’être plongé dans le moment présent, que de convoquer dans ce présent-même tout son passé et d’inspirer son avenir.

« Nous ne percevons, pratiquement, que par le passé, le présent pur étant l’insaisissable progrès du passé rongeant l’avenir. »

Pour Henri Bergson, la transition est réalité. Pour, lui, il ne s’agit donc pas d’oublier le passé pour vivre le moment présent. Il s’agit, au contraire, de convoquer tout son passé dans la densité du moment présent, pour qu’à sa lumière, notre moment présent soit éclairé. Nous comprenons alors différemment une idée, éclairés par notre expérience. Nous tombons alors amoureux différemment, éclairés par notre expérience. Nous faisons alors un choix différent, éclairés par notre expérience. Il s’agit de consentir en une fraction de seconde intense à tout ce que nous sommes : nos expériences, nos succès, nos échecs, nos qualités, nos défauts, nos fiertés, nos failles. Il est rare et précieux de nous trouver plongés dans cette conscience, mais une fois présente, elle nous enrichit et donne à notre perception de la réalité un prisme plus profond et plus riche. Épouser cette philosophie bergsonienne, c’est se rendre compte que chaque instant que nous vivons épaissit l’instant qui vient. C’est dire un grand « oui » à tout ce que nous avons vécu, les joies incroyables comme les douleurs les plus grandes, sans rien refouler ni laisser à l’oubli. C’est finalement découvrir que vieillir c’est grandir, et qu’accepter sa vie c’est lui donner la chance d’être plus vivante.

Le tourbillon de la danse étourdit

A trop vouloir vivre, parfois, nous nous perdons en chemin. Nous pouvons être tellement aspirés par le mouvement, par la danse, qu’elle devient un tourbillon étourdissant. Nous pouvons devenir fous à trop tournoyer. Si nous changeons d’idée à chaque fois qu’un brillant orateur nous convainc, si nous devenons passionnément amoureux à chaque fois qu’une personne charmante nous séduit, si nous bougeons de lieu de vie à chaque fois que l’appel du large se fait entendre, la danse de la vie peut devenir un véritable cauchemar. Alors, que faire ? Il y a peut-être deux réponses possibles : accepter cet espace de vide sans vie en soi, et chercher où ancrer son navire pour survivre au milieu de la tempête.

S’il y a tourbillon de vie presqu’en folie, c’est peut-être pour combler un vide que nous avons enseveli. Sortir de la danse mortelle, c’est accepter ce trou noir en nous, qui fait partie de nous. Pour certains, c’est un espace que Dieu seul peut combler. Pour Krishnamurti, c’est un face-à-face à faire avec soi-même, sans peur, sans jugement, sans bruitage et sans ego qui seul peut faire grandir notre conscience et apporter des réponses. Quoi qu’il en soit, nous pouvons sortir de la danse en nous arrêtant et en contemplant notre quête.

S’il y a tourbillon de vie presqu’en folie, c’est peut-être aussi parce que rien ne nous retient. Nous poursuivons une quête infinie parce qu’il n’y a rien de certain dans notre vie. Ne faudrait-il pas alors chercher en nous ce qui ne change pas ? Ce serait un trait de personnalité auquel nous tenons, ou un horizon que nous voulons atteindre, ou encore un idéal auquel nous ne saurions renoncer. Dans un de ses titres la chanteuse Regina Spektor dit : 

« Pick a star on the dark horizon and follow the light. »

Peut-être que pour mieux danser avec le rythme de la vie nous devons garder les yeux grands ouverts aussi sur notre étoile ? Peut-être que pour mieux entreprendre les voyages qui nous appellent nous avons besoin de savoir que la chaleur d’un foyer nous attend ? Peut-être que pour mieux épouser le mouvement, nous devons apprendre à nous arrêter et respirer ? 

Conclusion

La vie est une formidable aventure pleines de surprises, de découvertes et de rencontres. Pour les personnes curieuses et gourmandes comme moi, cet espace infini et coloré est magnifique mais peut aussi faire tourner la tête. Alors, il nous faut apprendre à respirer, nous ressourcer et reculer pour mieux sauter. A l’inverse, je connais des personnes qui ont tellement peur de la vie elle-même qu’elles passent à côté de cette vie qui toque chaque jour à leur porte. Elles sont enferrées dans un train-train quotidien qu’elles ont elles-mêmes créé pour se protéger du monde, de la souffrance, et du changement. C’est comme si elles pourraient voir le monde derrière des lunettes arc-en-ciels mais qu’elles se contentent de la version grisonnante. Si tu te reconnais, j’espère que ces quelques lignes t’inspireront à oser chercher comment briser tes propres chaines. Il suffit parfois de laisser ta porte entrouverte à une seule personne ! Comme ce personnage d’Aurélie Valognes, Monsieur Ferdinand, un vieil homme enfermé à double tours chez lui qui un jour entend un ding-dong : c’est Juliette une petite fille curieuse et pleine de cœur. Le début d’une grande aventure qui va le mener à danser et même chanter avec la vie !

Pour aller plus loin :

Trois questions que je vous invite à méditer pour aller plus loin :

1- Quels sont les trois moments de mon existence qui m’ont apporté le plus de joie ?

2- Quel élément de mon passé que je tente d’oublier pourrait trouver un sens et même enrichir ma situation présente ?

3- Quelle action puis-je mettre en place dès demain pour bien danser au rythme de la vie : ni trop, ni trop peu ?

Références philosophiques :

– Charles Pépin : Comment épouser le mouvement de la vie 

– Henri Bergson : L’évolution créatrice

– Eckart Tollé : Le pouvoir du moment présent

– Krishnamurti : Face à soi-même, réflexions sur la nature de l’être